William McGrégor Paxton - Le Collier de perles (1909)
Il était là parmi quelques autres, dans le coffret depuis si longtemps.
Depuis toujours ? Non. Depuis que ma mère, un jour lointain, me l'avait donné simplement parce que je le trouvais joli.
Le glissant dans le creux de ma main elle m'avait dit : "C'est un souvenir de Madame Milhault, notre chère voisine".
Je ne l'avais que rarement porté, deux, trois fois peut-être (je ne suis pas bijoux, bijoux...) mais ce jour-là, en ouvrant le coffret, mes yeux ne virent que lui tandis que mes doigts le caressaient en le soulevant doucement.
C'était un long et élégant sautoir d'argent, ponctué de nombreuses perles, discrètes mais d'une lumière et d'un éclat que l'obscurité prolongée de sa précieuse prison n'avait pas altérés.
Lentement je le mis autour de mon cou, le répartis en deux chutes d'inégales longueurs et me penchai vers le miroir. Je portais ce jour-là un fin chemisier blanc-bleu lagon et, sur cette couleur d'eau claire, comme par enchantement, il reprenait vie.
Il reprenait sa vie.
C'est alors que dans le miroir se dessinèrent un autre visage ainsi qu'une valse d'images. La douce Madame Milhault était devant moi, telle qu'il y a bien longtemps je l'avais connue, avec ses canezous délicieusement surannés, ses jolis corsages immaculés tout de dentelles, de fins plissés, de petits boutons nacrés... Elle portait à son cou le joli sautoir d'argent.